Flux RSS de nos articles
Flux RSS de nos vidéos
Divers

Nintendo/Sega: Pourquoi les deux cas n'ont rien à voir entre eux

Par Fry, le dimanche 17 août 2014 à 19:40

Avec la mauvaise situation de la Wii U (qui tend à s'améliorer ces derniers temps) et les débuts un peu chaotiques de la 3DS, il est devenu courant depuis le début de la nouvelle génération de voir des gens faire le parallèle entre l'actuelle situation de Nintendo et la situation de Sega en 2000/2001, à la fin de vie de la Dreamcast. Ce parallèle on le retrouve aussi bien dans les débats entre les joueurs que dans la presse ou dans les propos de certains analystes. Un parallèle qui semble évident et facile à faire à première vue et il est vrai qu'il est assez difficile de penser aux débuts compliqués de la Wii U sans penser à la fin prématurée de la dernière console de l'ancien concurrent direct de Nintendo. Pourtant, la situation de Sega de 2000 à 2002 et la situation actuelle de la firme de Kyoto sont deux situations qui n'ont tellement rien à voir entre elles que le parallèle entre les deux relève bien plus de l'absurde que d'autre chose et je vais vous expliquer pourquoi de ce pas.

Nintendo n'est pas prêt de mourir

Nintendo est une société bien particulière. En effet, c'est une société qui n'a pas eu n'importe qui à sa tête, c'est une entreprise qui pendant plus de 50 ans a été dirigée par ce maestro très reconnu aujourd'hui pour ses qualités de chef d'entreprise, j'ai nommé le fameux Hiroshi Yamauchi. Au cours des décennies passées à la tête de la compagnie, Hiroshi aura tiré de nombreuses leçons et aura fini par mettre en place une façon de diriger bien à lui, quelque chose que j'ai l'habitude de surnommer "la doctrine Yamauchi". Après avoir connu plusieurs périodes difficiles et avoir cru, à plusieurs reprises, être à deux doigts de la fin de la société, l'homme aura compris comment assurer la survie et la pérennité de Nintendo et aura tout fait pour. Hiroshi Yamauchi a fait de sa firme une entité extrêmement prudente en ce qui concerne son porte monnaie.
Premièrement, la firme de Kyoto est très peu dépensière, elle évite toute dépense lorsque ce n'est pas nécessaire et lorsqu'elle finit par tout de même réaliser une transaction, elle se contente du strict minimum.
En effet, dans un secteur (celui des nouvelles technologies) où le rachat de société est monnaie courante et alors que des entreprises comme Sony, Microsoft, Google ou encore Facebook se livrent régulièrement à cette activité en rachetant de nombreuses sociétés et start-up à des tarifs parfois exorbitants, Nintendo, de son côté, fait office d'intrus de la bande. Le rachat de sociétés n'est effectivement pas la politique de la firme du plombier moustachu (bien qu'Iwata n'y soit pas formellement opposé) et la dernière transaction d'envergure dans ce domaine remonte à 2007 lorsque la firme avait fait l'acquisition de 80% des actions détenues par Namco Bandai dans le studio Monolith Soft. Le second rachat majeur remonte à 2001 lorsque le président de Retro Studios avait vendu toutes les parts qu'il détenait dans son entreprise à Nintendo, on est donc à des années lumières des pratiques de la plupart des autres firmes du secteur.
Deuxièmement, la firme de Kyoto est une firme qui lorsqu'elle dégage des bénéfices en met systématiquement une partie de coté. C'est donc une firme qui épargne beaucoup. Nintendo passe donc son temps à épargner et dépense cette épargne le moins possible. Bien sûr en ce qui concerne les liquidités d'une firme on parlera plutôt de trésorerie que d'épargne. Ainsi, la société a finit, avec le temps, par se retrouver avec une trésorerie imposante, Hiroshi Yamauchi avait en effet compris qu'il était nécessaire de reposer sur de confortables réserves de liquidités pour pouvoir faire face sereinement à toute éventualité.

Cette doctrine est aujourd'hui toujours appliquée par Satoru Iwata et c'est ainsi que, comme nous vous le disions dans un autre article il y a quelques mois, Nintendo possède une trésorerie si imposante qu'elle pourrait bider sur les 5 prochaines générations sans jamais être menacée de faillite. Vous l'aurez sûrement deviné, ce n'était bien sûr pas le cas de Sega qui en 2002 n'avait presque plus aucune liquidité et qui a du trouver un acheteur pour survivre (Sammy Corporation, avec qui Sega a finit par fusionner pour former une imposante holdings nommé Sega Sammy Holdings Inc. chargé de coordonner les activités de ses deux filiales, Sega d'un coté, Sammy de l'autre.)

Un contexte historique bien différent

Pour analyser correctement la situation actuelle de Nintendo et celle de Sega en 2001, il est impératif de ne pas oublier le contexte dans lequel elles s'inscrivent. Sur ce point la comparaison est très très simple. Tout d'abord, Sega en 2001 était dans une très mauvaise situation financière et contrairement au mythe très répandu, ce n'est pas principalement la faute de la Dreamcast mais bien celle du passé de la compagnie. Contrairement à Nintendo, Sega ne s'est pas construit une trésorerie imposante et n'a jamais vendu autant de consoles que son concurrent. Si on se souvient souvent de Sega pour ses principaux succès comme par exemple la Megadrive, on oublie trop souvent que la compagnie a essuyé de nombreux échecs consécutifs: La Game Gear et la Nomad dans un premier temps, deux tentatives dans le domaine des consoles portables qui se sont soldées par deux échecs cuisants. La Mega-CD et la 32-X dans un second temps, deux extensions pour le Megadrive développées en parallèle, l'une par Sega Japon, l'autre par Sega America, premier signe majeur d'une mésentente importante entre les deux branches de la société qui trop souvent s’auto-concurrençaient de manière évidemment contre-productive. Enfin, la Saturn, avant dernière console de la compagnie et échec total en terme de ventes.
Ensuite, passons à Nintendo. Le constat pour la firme de Kyoto est très simple, cette dernière sort d'une période extrêmement bénéfique pour elle, la Wii et la DS se sont vendues par camions entiers pendant des années et sa portable a même été à 2 doigts de devenir la console de jeu vidéo la plus vendue de tous les temps. Cette période a bien évidemment été une période où la compagnie a généré de nombreux bénéfices venant considérablement augmenter les réserves de liquidités de l'entreprise.

Deux contextes qui n'ont donc rien à voir entre eux, quand Sega souffrait d'une mauvaise santé financière due à une suite d'échecs tous plus cuisants les uns que les autres, Nintendo, de son côté, sort d'une période faste et repose sur une trésorerie très confortable.

Sega et ses nombreux conflits internes

Alors que Nintendo baigne dans une sorte de consensus qui tend à penser qu'il est nécessaire pour la firme de continuer à développer ses propres écosystèmes pour pouvoir y commercialiser des logiciels vraiment innovants et originaux, et ce malgré l'avis de certains des actionnaires qui visiblement ne doivent pas vraiment maîtriser quoi que ce soit en matière de jeu vidéo, Sega de son côté baignait dans une ambiance très conflictuelle. Sega était une compagnie à deux vitesses, deux branches qui avaient du mal à se coordonner. Sega Japon et Sega America ont toujours eu des rapports très particuliers et trop peu souvent amicaux. En résulte des situations assez comiques, Sega avait en effet l'habitude de lancer plusieurs projets en parallèle et lorsqu'il a fallu commencer à envisager l'après Megadrive, la compagnie n'a pas hésité a lancer 3 projets en parallèle, deux d'entre eux ont aboutis, l'accessoire 32-X pour la Megadrive (projet confié à Sega America) et la Saturn (développée par Sega Japon), une nouvelle console. Bien évidemment, l'existence des deux produits et leurs dates de sortie proches l'une de l'autre représentait quelque chose d'absurde. Au final, ni l'une ni l'autre n'a connu le succès.
Lorsqu'il faut réfléchir à la conception de la génération suivante, rebelote, Sega met ses équipes en concurrence et lance deux projets en parallèle et fini par saboter cette concurrence en imposant sa propre vision, minant ainsi totalement celui des deux projet qui avait été initialement choisi. Ainsi est née la Dreamcast.

Derrière ce "conflit" entre les branches japonaises et américaines de la compagnie, la première snobant complètement la seconde et imposant sa vision au détriment des avis des autres, se cachait une situation bien particulière. On pense généralement que la décision d'arrêter les consoles a été prise dans l'urgence suite à l'échec de la Dreamcast, mais la réalité est toute autre. Les discordes au sein de l'entreprise se focalisaient justement sur ce point précis. Depuis au moins la période Saturn, deux clans au sein du conseil d'administration de la compagnie s'affrontaient. Les partisans d'un Sega constructeur de consoles d'un coté, les partisans d'un Sega uniquement éditeur de jeux de l'autre. Un conflit qui remonte donc à bien plus loin qu'on ne le pense habituellement. C'est ce conflit qui a mené la firme la où elle est aujourd'hui. Lors du développement de la Dreamcast le camp des partisans d'un Sega constructeur était encore majoritaire mais leur majorité ne tenait qu'à un fil. Très vite et par une suite de plusieurs événements que nous ne décrirons pas en détails aujourd'hui, le camp des partisans d'un Sega éditeur a pris le dessus et a tout fait pour miner la Dreamcast, sa propre console. Alors que cette dernière aurait parfaitement pu marcher et terminer la génération sur un beau parcours, elle a été littéralement coupée dans son élan, non pas parce qu'elle ne se vendait pas (elle se vendait même mieux que la Wii U après le même nombre de mois d'existence) mais parce qu'il existait une forte volonté au sein de l'équipe administrative de cesser toute production de ce type de produits.
La disparition du Sega constructeur a d'ailleurs largement profité à Microsoft lorsque la firme s'est lancé sur ce marché et les liens entre certains anciens employés de Sega, hauts placés dans l'entreprise à l'époque, et la société de Bill Gates ne sont probablement pas étrangers au changement de cap de Sega.

Cette situation bien propre à Sega ne se retrouve pas aujourd'hui au sein de Nintendo et l'augmentation cette année du taux de confiance des investisseurs envers Satoru Iwata, qui s'oppose farouchement à ce que Nintendo cesse la production de consoles, tend à le prouver.

Pour conclure, j'espère avoir démontré de façon claire que la situation des deux entreprises sont tellement divergentes que le parallèle en devient complètement absurde. Tout d'abord parce que Nintendo n'est pas prêt de mourir de part son immense trésorerie, ensuite parce que le contexte dans lequel les deux sociétés s'inscrivent est totalement différent et enfin parce que Sega souffrait de nombreux conflits internes qui l'ont mené à sa quasi-faillite en 2002.
Pour des explications plus claires et plus précises sur le cas de Sega et la fin du Sega fabricant de console on ne peut que vous conseiller l'excellente vidéo de UnDropDansLaMare que vous pouvez visionner en cliquant ici.

 Poster un commentaire (4)
#1 Lundi 18 Août 2014 à 13:53:06

en bref nintendo est une societe qui connait ses limites et ne depence pas de l'argen lorsque ce n'est pas necessaire contrairement a sega qui essaye de detruire sa propre consoles et je trouve stupide les petits conflit sega japon et sega america c comme si iwata se disputait avec reggis 😬

#2 Mardi 19 Août 2014 à 01:26:07

Hé bien, voilà un article inattendu qui a le mérite de présenter les choses autrement tout en restant objectif, bref, du bon travail.

Édité par Myster le Mardi 19 Août 2014 à 01:26:47
#3 Samedi 23 Août 2014 à 17:33:37

Par contre Nintendo ne apprend pas assez de ses erreurs (celle qui lancement de la 3DS par exemple.

#4 Lundi 25 Août 2014 à 14:20:59

Le problème c'est que quand les autres constructeurs commettent les mêmes erreurs, l'internet presque entier appelle ça des stratégies opaques. Dans un contexte de Nintendo Bashing, tout n'est qu'erreur.

Poster un commentaire

S'inscrireConnexion